Allée Royale
Selon Georges Guillet de Saint-Georges, six termes de Michel Anguier étaient situés à Versailles dans la Grande Allée, c’est-à-dire l’allée Royale11. Conférences de l’Académie royale de peinture et de sculpture, 1648-1792, t. II, 2008, vol. 1, p. 244-258 (« Mémoire historique des ouvrages de sculptures de M. Anguier » lu le 6 mai 1690), à la p. 253..
Il s’agit probablement des six termes de pierre d’Anguier mentionnés en 1664 par les sources comptables (Vjs 728)22. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. I, col. 21, paiements des 30 juin et 25 septembre 1664..
Ces termes ont peut-être été déplacés au plus tard en 1687 : cette année-là, les manouvriers Picard et Le Cocq furent rétribués « pour avoir transporté hors le jardin la pierre des piédestaux qui estoient dans l’allée Royalle33. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. II, col. 1120, paiement du 11 mai 1687. ».
L’entrée de l’allée Royale
L’inventaire de 1686 signale explicitement quatre sculptures dans l’allée Royale :
- Pierre Puget, Persée et Andromède (MR 2076) ;
- Pierre Puget, Milon de Crotone (MR 2075) ;
- François Lespingola, Junon Cesi, dite aussi Bérénice (MR 2033) ;
- François Lespingola (ou Michel Monier, ou Martin Carlier, ou Nicolas Frémery), Cérès Mattei, dite aussi Faustine (MR 1859).
Le groupe de Milon (MR 2075) fut installé en juillet 1683 au sud de l’entrée de l’allée Royale ; celui de Persée et Andromède (MR 2076) le fut en juillet 1685 au nord de l’entrée de l’allée Royale44. Maral, 2013-2..
Des modèles en terre cuite des groupes de Milon et de Persée et Andromède sont attestés par d’anciennes sources55. Herding, 1970, p. 173 ; Souchal, 1977-1993, t. III, 1987, p. 200..
Compte tenu de l’ordre suivi par l’inventaire de 1686, il est vraisemblable que la Junon Cesi (MR 2033) ait été placée au sud, la Cérès Mattei (MR 1859) au nord.
C’est probablement en vue de leur installation comme pendants de part et d’autre de l’allée Royale que la Cérès Mattei (MR 1859) fut nettement agrandie au regard de l’original romain, mais également de l’autre copie versaillaise (MR 2083), située sur la rampe nord du parterre de Latone.
Sans doute à l’emplacement des statues de Cérès (MR 1859) et de Junon (MR 2033), indiquées au bassin de Neptune par l’inventaire de 1694, deux nouveaux groupes furent placés après 1686 :
- François Lespingola, Paetus et Arria Ludovisi (MR 2035), voituré à Versailles le 17 novembre 168866. Lettre de Fossier du 29 août 1694 ;
- Martin Carlier, Papirius et sa mère Ludovisi (MR 1968).
Le groupe de La Paix des Grecs, dit aussi Papirius et sa mère (MR 1968), avait été commandé à Benoît Massou en 1684 et, ce dernier étant décédé, exécuté par Michel Monier, décédé à son tour en 1686, et Martin Carlier qui l’acheva en 1688.
Ces deux groupes sont établis à l’allée Royale par l’inventaire de 1694.
Selon Mme Jourdain, qui écrit en 1695, ces groupes se trouvaient à l’entrée de l’allée Royale, celui de Papirius et sa mère (MR 1968) au nord, celui de Paetus et Arria (MR 2035) au sud77. Description des jardins de Versailles par Jourdain, janvier 1695, fol. 7v-8 et 17v-18..
L’inventaire de 1686 fait état de la présence à Versailles des deux grands Vases à décor d’instruments de musique réalisés par Jacques Herpin (MR 3023) et Jean Robert (MR 3024).
Selon l’« Estimation faite le 15e aoust 1692 pour servir aux parfaits payemens », les deux vases sont situés à l’entrée de l’allée Royale, celui de Robert (MR 3024) au sud, celui d’Herpin (MR 3023) au nord88. Estimation du 15 août 1692, no 43 (vase de Robert, à proximité du groupe de Paetus et Arria, no 42) et no 75 (vase de Herpin, à proximité de la statue de La Fidélité de Lefebvre, no 77)..
Ce dispositif est confirmé par Mme Jourdain, qui précise que ces deux vases ont été exécutés « d’après le dessein de M. Manssard [sic]99. Description des jardins de Versailles par Jourdain, janvier 1695, fol. 9 et 18. ».
En 1712, le groupe de La Paix des Grecs (MR 1968) fut installé au bosquet de la Salle de bal et remplacé à l’entrée de l’allée Royale par celui de Castor et Pollux (MR 1816), copié par Antoine Coysevox d’après un modèle antique de la collection romaine de Christine de Suède. Le groupe de Castor et Pollux a été mis à l’abri en 2021 et remplacé par une réplique (2022.00.001) en 2022.
Les vases de Herpin (MR 3023) et de Robert (MR 3024) sont encore attestés en place par le plan gravé de Contant de La Motte publié en 1783. Ils furent transférés dans les allées du Printemps et de l’Hiver, face aux entrées occidentales des quinconces du Nord et du Midi, au plus tard en 17871010. Description par Durameau, 1787, p. 137 (MR 3024) et 146 (MR 3023)..
Les vases de l’intérieur de l’allée Royale
L’inventaire de 1694 signale quatorze autres vases à l’intérieur de l’allée Royale.
Selon Mme Jourdain, les vases étaient ainsi disposés :
Mis en chantier en 1687, ces quatorze vases furent confiés à autant de sculpteurs, choisis au terme d’une concertation entre Louvois et Hardouin-Mansart : Marc Arcis, François Barrois, Jean Degoullons, Jean Drouilly, Jean Hardy, Jacques Herpin, Jean Joly, Armand Lefebvre, Jean Légeret, Barthélemy de Mélo, Jean-Baptiste Poultier, Joseph Rayol, Sébastien Slodtz et Philibert Vigier.
Les seize vases de l’allée Royale furent conçus par paires.
À propos de l’ensemble des vases de l’allée Royale, Jean-Aymar Piganiol de La Force indique dans son guide publié en 1701 qu’« il faut remarquer que tous ces vases sont des profils et desseins de M. Mansart1111. Piganiol de La Force, 1701, p. 220. ».
L’édition de 1707 du guide de Piganiol de La Force signale au bosquet de l’Île Royale, de part et d’autre du bassin du Miroir, les deux vases de Drouilly (MR 3014) et de Mélo (MR 3015)1212. Piganiol de La Force, 1707, p. 301 (MR 3014) et 304 (MR 3015)..
Dans la mesure où l’inventaire de 1707 les relève encore sur l’allée Royale, il est probable que le mouvement ait eu lieu en 1707, entre la date de rédaction de l’inventaire et celle de publication du guide de Piganiol de La Force (approuvé le 11 août 1707).
Les vases de Drouilly (MR 3014) et de Mélo (MR 3015) furent remplacés, dès 1707, par ceux de l’avant-dernière paire, dus à Degoullons et Hanard (MR 2783) et à Légeret (MR 3018).
Le passage de sept paires à six paires semble s’être accompagné d’un redéploiement de l’ensemble des vases, de manière à conserver un espacement régulier d’une paire à l’autre.
Schéma de répartition des douze vases de l’intérieur de l’allée Royale selon le guide de Piganiol de La Force en 1707 :
Les vases de Poultier (MR 2800) et de Herpin (MR 3019) étaient à l’origine ornés de fleurs de lys, inscrites dans le motif de treillage, et, ceux de Lefebvre (MR 2808) et de Hardy (MR 2809), du chiffre royal entouré de branches de chêne et de laurier. En 1794, le sculpteur Amable Boichard fut chargé de polir les vases de Lefebvre et Hardy à l’emplacement des chiffres royaux, supprimés sur les deux faces1313. Mémoire de sculpture par Boichard, 29 août 1794. Il est vraisemblable que ceux de Poultier et Herpin aient perdu leurs fleurs de lys également durant la période révolutionnaire.
Les statues et groupe de l’intérieur de l’allée Royale
Passée au cours des années 1684-1685, une première commande de sculptures pour l’intérieur de l’allée Royale aboutit à la mise en place, après 1686, de quatre copies d’après l’antique : l’Hercule Commode du Belvédère (MR 2003) de Noël Jouvenet, l’Amazone Mattei (MR 1771) de Jacques Buirette, la Vénus Médicis (MR 1861) de Martin Carlier, Michel Monier et Nicolas Frémery et le Faune au chevreau de la reine Christine de Suède (MR 1849) d’Anselme Flamen.
Le sculpteur Pierre Granier fut rétribué à partir de novembre 1686 pour être intervenu sur la Junon de Smyrne (MR 250) et le Jupiter de Smyrne (MR 255)1414. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. II, col. 991, paiement du 17 novembre 1686.. Ces deux statues antiques, provenant de Smyrne, furent aussi disposées sur l’allée Royale après 1686, l’une en face de l’autre, Junon au sud, Jupiter au nord. Selon les Remarques historiques de Mme Jourdain, la restauration de la statue de Junon fut menée par Simon Mazière1515. Description des jardins de Versailles par Jourdain, janvier 1695, fol. 9..
À partir de 1684, les sculpteurs Louis Le Conte et Armand Lefebvre furent chargés d’exécuter les statues allégoriques de La Fourberie (MR 2011) et de La Fidélité (MR 2014). Ils travaillèrent d’après des dessins fournis par le peintre Pierre Mignard. Mentionnées par l’inventaire après décès de ce dernier, des esquisses en cire dorée de La Fidélité et de La Fourberie sont visibles sur l’autoportrait (fig. 1) de Mignard conservé au musée du Louvre1616. Boyer, 1999, p. 50..
À partir de 1687, deux autres sculptures furent commandées pour l’intérieur de l’allée Royale : Cyparisse et son cerf (MR 1848) d’Anselme Flamen et Didon sur le bûcher (MR 2074) de Jean-Baptiste Poultier, toutes deux réalisés à partir de modèles définis par François Girardon.
Outre les deux vases et quatre groupes de l’entrée de l’allée Royale et les quatorze vases de l’intérieur de l’allée Royale, l’inventaire de 1694 mentionne, au chapitre des groupes et figures de marbre, douze sculptures à l’intérieur de l’allée Royale :
- No 85 : Lefebvre, La Fidélité (MR 2014)
- No 86 : Le Conte, La Fourberie (MR 2011)
- No 87 : Junon, statue antique (MR 250)
- No 88 : Jupiter, statue antique (MR 255)
- No 89 : Flamen, Faune, d’après l’antique (MR 1849)
- No 90 : Jouvenet, Hercule Commode, d’après l’antique (MR 2003)
- No 91 : Poultier, Didon (MR 2074)
- No 92 : Carlier, Vénus (MR 1861)
- No 93 : Buirette, Amazone (MR 1771)
- No 94 : Flamen, Cyparisse (MR 1848)
- No 95 : Bacchus, antique (Vjs 826)
- No 96 : Muse, antique (Vjs 386)
Des annotations portées sur l’inventaire de 1694 précisent que :
- Junon (MR 250) fut remplacée en août 1696 par la Vénus Richelieu de Legros (MR 2021)
- Bacchus (Vjs 826) fut remplacé en août 1695 par Achille de Vigier (MR 2113)
- La Muse (Vjs 386) fut remplacée en août 1695 par Artémise de Desjardins (MR 1834).
Junon (MR 250) fut transférée dans les allées d’Apollon au Grand Canal.
Provenant du bassin de Neptune, Bacchus (Vjs 826), en fait un Bacchus Médicis, fut transféré à Marly, de même que la Muse (Vjs 386)1717. Inventaire des papiers des Bâtiments du Roi, vers 1720, « État des figures […] posez dans les jardins de Marly », 1er avril 1698, p. 343-348, à la p. 346 (« Bosquet du côté de Louveciennes […]. De l’allée Royale de Versailles. A[ntique]. Une muse ») et aux p. 347-348 (« Bosquets du côté de Marly […]. Tiré de l’allée Royale de Versailles en 1695, placé dans le jardin de Marly, ôté depuis et remis au magasin. A[ntique]. Bacchus »).. Dans la mesure où la Muse (Vjs 386) était encore présente dans les jardins de Versailles en 1694, il est probable que Thomassin l’ait reproduite. De fait, la planche 120 du recueil de ce dernier correspond à la seule gravure susceptible de représenter cette statue. Les deux sculptures ne sont plus localisées.
Dans la mesure où les statues de Bacchus (Vjs 826) et de la Muse (Vjs 386) ont été remplacées par des sculptures commandées en 1687, il n’est pas impossible que ces dernières – l’Achille de Vigier (MR 2113), exécuté à partir d’un modèle défini par Girardon, et l’Artémise de Desjardins (MR 1834) – aient été prévues dès l’origine pour l’allée Royale. D’autant qu’elles s’intègrent dans le programme des œuvres modernes commandées pour celle-ci.
La disposition des sculptures à l’intérieur de l’allée Royale est connue grâce à Mme Jourdain, qui mentionne l’Achille de Vigier (MR 2113) et l’Artémise de Desjardins (MR 1834).
Schéma de répartition des onze statues et du groupe de l’intérieur de l’allée Royale à partir d’août 1696 :
Entre 1692 et 1694, et jusqu’en 1701 au moins, le terme de Pan de Mazière (MR 2052), rattaché au programme de la demi-lune du bassin d’Apollon, fut sans doute placé à l’intérieur de l’allée Royale.
Commandée en 1687 à Sébastien Slodtz, qui travailla à partir d’un modèle défini par Girardon, la statue d’Hannibal (MR 2093) ne fut pas achevée avant 1704 et ne parvint jamais à Versailles.
Dans la mesure où elle est mentionnée, par le mémoire de 1689, au sein d’un ensemble de sculptures qui furent placées dans l’allée Royale, il est plus que probable qu’elle fut commandée pour l’allée Royale.
Elle fut placée au jardin des Tuileries en 1722.
Depuis 1872, elle est conservée au musée du Louvre.
Au plus tard en 1695, Nicolas Coustou reçut la commande d’une statue de Jules César (MR 1798). Un dessin du fonds Robert de Cotte porte l’ordre, signé et daté du 26 juillet 1695 par le surintendant Colbert de Villacerf, de remettre le bloc de marbre au sculpteur1818. Agence des Bâtiments du roi (fonds Robert de Cotte), vers 1700, dessin no 2035 (microfilm F 001833).. Au bas du dessin, une main qu’il est possible d’identifier à celle de Girardon a inscrit : « Jul Sézar, d’après un [mot illisible] de sire, pour acompagner la figure d’Anibal. »
Le premier paiement consigné dans les registres comptables remonte à juin 16991919. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. IV, col. 478, paiement du 7 juin 1699.. Coustou dut attendre 1713 pour percevoir l’essentiel de la somme qui lui était due2020. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. V, col. 695, parfait paiement du 24 octobre 1713..
À l’instar de l’Hannibal (MR 2093) de Slodtz, l’œuvre ne fut pas installée à Versailles, mais au jardin des Tuileries, en 1722, date de la signature apposée par Coustou.
Depuis 1872, elle est conservée au musée du Louvre.
Les groupes de l’extrémité occidentale de l’allée Royale
Le groupe de L’Enlèvement de Proserpine de Girardon (MR 1865) fut transféré à Versailles semble-t-il en 16962121. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. IV, col. 50, paiement du 11 mars 1696 à Jean-Denis Fossier, garde des magasins du roi, « pour avoir transporté un groupe de l’Enlèvement de Proserpine », dont la date du transport n’est pas précisée.. Il fut installé dans un premier temps sur le parterre d’Apollon, à l’emplacement occupé par la suite par le groupe d’Ino et Mélicerte (MR 1869)2222. Description des jardins de Versailles par Pigeon, 1696, p. 192 (« il est présentement sur le bord du bassin d’Apollon »)..
Le 30 janvier 1699, le groupe de L’Enlèvement de Proserpine est encore attesté sur son socle de la demi-lune du parterre du bassin d’Apollon2323. Registre des ordres de Louis XIV à Hardouin-Mansart, 1699-1702, fol. 3, ordre de Louis XIV de « faire un modèle de stuc d’un groupe de figures sur un pied d’estail de marbre, sur lequel est présentement L’Enlèvement de Proserpine près d’Apollon »..
Au printemps 1699, il fut placé au centre du bosquet de la Colonnade2424. Le 4 mai 1699, Girardon reçut « un culot de bassin de marbre blanc pour un socle du piédestal de L’Enlèvement de Proserpine », dont il restitua une partie par la suite (État des marbres délivrés aux marbriers et sculpteurs en 1699, fol. 4 ; État des marbres retirés des marbriers et sculpteurs en 1699)..
Fin avril 1699, le groupe de Guidi, La Renommée du roi (MR 1874), fut enlevé de son socle situé à l’entrée de la Colonnade2525. Journal de Dangeau, 1684-1720, t. VII, p. 72, 24 avril 1699 (Dangeau commet sans doute une confusion en indiquant que ce groupe était alors destiné à occuper le milieu de la Colonnade, alors qu’il fut placé sur le socle jusque-là occupé par L’Enlèvement de Proserpine, sur la demi-lune du parterre du bassin d’Apollon)..
Il fut établi à l’extrémité de l’allée Royale sur le socle du groupe de L’Enlèvement de Proserpine (MR 1865)2626. « Il estoit cy-devant [avant 1702] à l’entrée de la Colonade, dont on l’a osté pour le mettre icy [sur la demi-lune du parterre d’Apollon, côté sud] », d’après le manuscrit Description des sculptures des jardins de Versailles, 1702, p. 23..
La forme rectangulaire du socle était destinée à faire symétrie à celle des socles des groupes de Puget, à l’autre extrémité de l’allée Royale : elle correspondait aussi aux dimensions du groupe de Guidi (MR 1874).
Le déplacement du groupe de Guidi (MR 1874) n’était, semble-t-il, pas encore prévu au début de l’année 1699, puisque le 30 janvier 1699, Jules Hardouin-Mansart recevait l’ordre, probablement resté sans suite, de « faire un modèle de stuc d’un groupe de figures sur un pied d’estail de marbre, sur lequel est présentement l’Enlèvement de Proserpine [MR 1865], près d’Apollon2727. Registre des ordres de Louis XIV à Hardouin-Mansart, 1699-1702, fol. 3. ».
En février 1699, le nouveau surintendant des Bâtiments du roi, Jules Hardouin-Mansart, écrivit à Matthieu de La Teulière, directeur de l’Académie de France à Rome2828. Correspondance des directeurs de l’Académie de France à Rome, 1666-1793, t. II, 1888, p. 447. : « Je vous prie de me faire savoir sy le groupe d’Arria et de Petus pourra s’appareiller avec celuy de Domenico Guidi. Vous m’en ferez envoyer le dessein afin de que je le puisse faire voir au roy. » Il s’agissait du groupe en marbre de Paetus et Arria, entrepris à Rome par Jean-Baptiste Théodon en 1685 et achevé depuis 1695 par Pierre Lepautre, qui ne gagna la France qu’en 1715, pour être placé à Marly2929. Paris, musée du Louvre, département des Sculptures, MR 2029. Souchal, 1977-1993, t. II, 1981, p. 376.. Le socle septentrional, pour lequel le groupe de Lepautre avait été un moment pressenti, fut édifié à partir d’octobre 16993030. État des marbres délivrés aux marbriers et sculpteurs en 1699, fol. 22vo (livraison du 5 octobre 1699 au marbrier Lisqui « pour le piédestal qui doit faire simettrie à celuy de Dominique Guide »)..
Avant le 3 octobre 1699, Louis XIV donna l’ordre de « poser le pied d’estail de marbre du groupe à faire oposé à Dominique Guide dans le bout de la grande allée vis-à-vis le bassin d’Apollon » et de « faire faire le modèle en stuc du groupe à faire sur ledit pied d’estail par le sieur Girardon3131. Mémoire des ouvrages à faire entre septembre et décembre 1699, fol. 163vo, no 32 et 33. ».
En 1702, le groupe de La Renommée du roi (MR 1874) fut transféré à l’arrière du bassin de Neptune.
En août 1702, Louis XIV indiqua à Hardouin-Mansart « que l’on feroit faire, sur ce pied d’estal de Dominique Guide et sur celuy oposé dans ladite place d’Apollon, deux groupes de figures par les sieurs Coisvox et Coustou3232. Registre des ordres de Louis XIV à Hardouin-Mansart, 1699-1702, n. f. (ordre du 9 août 1702). ». Ces mystérieux groupes n’ont laissé aucune autre trace.
Le socle resté vacant du groupe de La Renommée du roi fut en fin de compte occupé par le groupe d’Ino et Mélicerte (MR 1869) de Pierre Granier. Ce dernier est mentionné par les sources comptables comme achevé en mai 17103333. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. V, col. 431-432..
Le groupe d’Ino et Mélicerte (MR 1869) avait été entrepris dès 1686, sans toutefois que sa destination ait été stipulée.
En 1705, le mouleur Robert fut rétribué, en juin, « sur les moules qu’il a fait des groupes de Prothée et Aristée, Ino et Mélicerte pour le château de Versailles » et, en août, « sur les figures qu’il a moulées et posées au château de Versailles en 17053434. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. IV, col. 1185, paiements du 28 juin et du 23 août 1705. ».
Un tirage en plâtre d’Ino et Mélicerte fut donc disposé sur la demi-lune d’Apollon, probablement en juillet 1705 : il est attesté par l’édition de 1707 du guide de Piganiol de La Force3535. Piganiol de La Force, 1707, p. 227..
Sans doute parce que ce dernier groupe n’avait pas été prévu pour ce socle, sa largeur fut augmentée en 17123636. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. V, col. 611, paiement du 20 juillet 1712. : sa récente restauration a permis de constater qu’il mesurait initialement 1,47 m, et fut augmenté des deux côtés pour occuper une largeur de 2,20 m, plus proche de celle du socle qui l’avait reçu (large de 2,30 m).
Le second groupe établi à l’extrémité occidentale de l’allée Royale est celui d’Aristée et Protée (MR 2092), exécuté par Sébastien Slodtz d’après un modèle de Girardon.
La commande de ce groupe avait été initialement passée au sculpteur Corneille Van Clève3737. Lettre de Girardon à Colbert de Villacerf du 28 juillet 1692.. Slodtz fut rétribué à partir d’avril 16883838. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, 5 vol., t. III, col. 102, paiement du 4 avril 1688..
Dressé en 1726, l’inventaire après décès de Slodtz mentionne « un modèle en plastre du grouppe de Prothée et Aristée, figure de la proportion de deux pieds et demy3939. Inventaire après décès de Slodtz, 26 juin 1726. ». Ce modèle correspond peut-être à celui de Girardon, ou tout au moins à un tirage en plâtre à partir du modèle d’origine en cire.
La destination versaillaise du groupe d’Aristée et Protée (MR 2092) n’est précisée par les sources qu’à partir de 1705, au moment où le mouleur Robert fut chargé de livrer une version en plâtre, qui fut installée sur le socle symétrique de celui d’Ino et Mélicerte (MR 1869) au bas de l’allée Royale4040. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. IV, col. 1185, paiements du 28 juin et du 23 août 1705.. L’édition de 1707 du guide de Piganiol de La Force en confirme la présence, sur le socle septentrional4141. Piganiol de La Force, 1707, p. 219..
Le parfait paiement fut versé en 17164242. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. V, col. 874. : il révèle que Slodtz a travaillé jusqu’en 1714. L’œuvre ne fut placée à Versailles qu’en 1723, ainsi qu’en témoigne le Mercure de mai 17234343. Mercure, mai 1723, p. 960-961..
L’allée Royale de 1800 à nos jours
En 1800, la statue du Jupiter de Smyrne (MR 255) fut transférée au musée du Louvre4444. Liste des objets d’art destinés à la galerie des Antiques, 22 avril 1800..
Elle fut remplacée par l’allégorie de La Terre de Benoît Massou (MR 2048), attestée sur l’allée Royale par la Notice des tableaux, statues, vases bustes, etc., composant le musée spécial de l’École française publiée en l’an X (septembre 1801-septembre 1802).
L’inventaire datable de 1819 signale encore La Terre (MR 2048) dans l’allée Royale.
Une annotation portée sur cet inventaire indique néanmoins : « Une statue représentant Homère par Roland a été depuis placée sur le tapis vert. » Il s’agit de la statue d’Homère chantant ses poèmes de Philippe-Laurent Roland (MR 2088).
Cette dernière fut retirée de l’allée Royale dès 18204545. Lettre du comte de Forbin au comte de Pradel du 25 septembre 1820..
En 1819, le groupe de Milon (MR 2075) de Puget fut transféré au musée du Louvre.
Le socle du Milon est encore mentionné comme vacant en 1827 par Jean Vaysse de Villiers, qui fait part du projet du sculpteur Jean-François Lorta d’y installer une copie en marbre du Milon4646. Vaysse de Villiers, 1827, p. 200.. Vaysse de Villiers suggère aussi de placer le groupe de Paetus et Arria (MR 2035) sur le socle vacant du Milon, en pendant au groupe de Persée et Andromède, « ces deux groupes étant tous les deux en action4747. Vaysse de Villiers, 1827, p. 201. ».
Le groupe de Milon (MR 2075) fut remplacé par le groupe de Paetus et Arria (MR 2035) en 1829.
Le groupe de Paetus et Arria (MR 2035) fut remplacé par le groupe de Papirius et sa mère (MR 1968) en 1829.
En 1850, le groupe de Persée et Andromède (MR 2076) de Puget fut transféré au musée du Louvre.
Il fut remplacé par le groupe du Laocoon (MR 2102) en 1850.
Entre 2000 et 2004, dans le cadre de la restitution des bosquets du Dauphin et de la Girandole, les Vases à décor d’instruments de musique de Herpin (MR 3023) et de Robert (MR 3024) furent réinstallés à l’entrée de l’allée Royale.
En 2009, la statue de Junon de Smyrne (MR 250) a été déposée pour figurer à l’exposition D’Izmir à Smyrne. Dans l’attente d’une réplique, elle n’a pas été remise en place.
En 2013, à l’occasion de l’année Le Nôtre, les répliques des groupes du Milon (inv. 2013.00.1081) et de Persée et Andromède (inv. 2013.00.1082) ont été installées à l’entrée de l’allée Royale, de manière à reconstituer le dispositif voulu par Louis XIV.
Leur mise en place a occasionné la dépose des groupes du Laocoon (MR 2102) et de Paetus et Arria (MR 2035).
Dans cette logique de reconstitution de l’état ancien, le groupe de Papirius et sa mère (MR 1968) a été déposé en 2015. Il a été remplacé en 2015 par la réplique du groupe de Paetus et Arria (inv. 2015.00.029).
Dans le cadre de la campagne de mise à l’abri des chefs-d’œuvre sculptés des jardins de Versailles, onze œuvres de l’allée Royale ont été mises à l’abri à partir de 2011 :
- La statue de La Fidélité (MR 2014) en 2011, remplacée par une réplique (inv. 2012.00.686) en 2012.
- La statue de La Fourberie (MR 2011) en 2012, remplacée par une réplique (inv. 2014.00.904) en 2014.
- Le groupe d’Ino et Mélicerte (MR 1869) en 2014, remplacé par une réplique (inv. 2015.00.011) en 2014.
- Le groupe d’Aristée et Protée (MR 2092) en 2015, remplacé par une réplique (inv. 2016.00.072) en 2016.
- La statue d’Achille à Scyros (MR 2113) en 2015, remplacée par une réplique (inv. 2015.00.368) en 2016.
- La statue de Didon sur le bûcher (MR 2074) en 2016, remplacée par une réplique (inv. 2017.00.114) en 2017.
- Le groupe de Cyparisse et son cerf (MR 1848) en 2016, remplacé par une réplique (inv. 2017.00.113) en 2017.
- La statue de la Vénus Richelieu (MR 2021) en 2017, remplacée par une réplique (inv. 2018.00.126) en 2018.
- La statue du Faune au chevreau (MR 1849) en 2017, remplacée par une réplique (inv. 2019.00.102) en 2019.
- La statue de l’Amazone Mattei (MR 1771) en 2019, remplacée par une réplique (2021.00.003) en 2020.
- La statue d’Artémise (MR 1834) en 2019, remplacée par une réplique (2021.00.002) en 2021.