Alexandre Maral, avec la collaboration de Cyril Pasquier
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Jardins de Versailles Bosquets actuels Bosquet de la Salle de bal

Bosquet de la Salle de bal

Au sud du parterre de Latone, le bosquet de la Salle de bal reçut entre 1682-1683 un ameublement raffiné de vases et de torchères de plomb doré, dont les modèles furent mis au point en 1681 par Jacques Houzeau11. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. II, col. 173, paiement du 9 juillet 1682 à Houzeau relatif aux modèles élaborés en 1681..
En mars 1682, le marquis d’Ormoy écrit à son père, Colbert, surintendant des Bâtiments du roi, que « les sculpteurs ont signé le marché pour les ouvrages de plomb et étain de la Salle de bal », à l’exception d’Étienne Le Hongre, « qui ne peut point faire les petits vases à 450 livres22. Lettres, instructions et mémoires de Colbert, 1658-1683, t. VII, p. CLVIII, lettre du 13 mars 1682. ». Il ajoute : « La vérité est que, quoyque ces vases soyent plus petits, ils sont néanmoins plus chargés d’ouvrages que les grands dont on donne 550 livres, ayant autour des bacchanales en bas-relief qui demandent un grand soin. »

Côté oriental, dominant la grande cascade, quatre grands vases furent exécutés par Louis Le Conte, dit Le Conte de Boulogne : deux Vases aux anses supportées par une tête de dauphin (MR 3471 et MR 3472) et deux Vases aux anses supportées par un protomé de lion (MR 3473 et MR 3474). Du point de vue de leur forme générale, ces quatre vases se rattachent au modèle antique du célèbre Vase Médicis. Ornés de guirlandes et d’étonnants masques de comédie, ils se distinguent par l’inventivité du répertoire décoratif mis en œuvre.

En face, du côté des gradins, les quatre autres vases sont dus à Le Hongre, beau-père de Houzeau. De forme relativement plus simple, ils comportent en revanche un relief continu sur la panse : la Scène de danse (MR 3470) et le Triomphe de Neptune et d’Amphitrite (MR 3468) sont repris sur un mode enfantin par la Bacchanale d’enfants (MR 3469) et le Triomphe marin d’enfants (MR 3467).

Mieux visibles car posées en partie basse, les huit imposantes torchères de la Salle de bal viennent en quelque sorte évoquer le luminaire – mais ici dépourvu d’éclairage – propre aux lieux de réjouissances nocturnes.
Côté cascade, les quatre torchères de Pierre Legros et Benoît Massou (MR 3480, MR 3481, MR 3482 et MR 3483) sont portées par des pieds de bœuf : leur piètement est décoré de scènes d’enfants, la partie supérieure de trophées d’instruments de musique accordés à la fonction du lieu, tandis que de curieuses têtes coiffées du bonnet phrygien apparaissent sur la partie médiane, pleines de cet esprit d’invention propre au répertoire des formes issu du monde de l’orfèvrerie.
Côté gradins, les quatre torchères de Noël Jouvenet et Pierre Mazeline (MR 3484, MR 3485, MR 3486 et MR 3487), portées par des pattes de lion, sont ornées de reliefs d’instruments de musique et d’admirables figures de danseuses tenant des instruments de musique.
Les vases et les torchères ont été déposés en 1939 dans le cadre de la défense passive. Lors de leur repose, les torchères ont été pivotées, si bien que l’angle de leur base triangulaire pointe désormais vers l’intérieur de la pièce centrale du bosquet. L’ancienne disposition, avec angle pointant vers l’extérieur, est visible sur le cliché faisant partie du recueil de Gaston Brière33. Brière, 1911, pl. 41..

La partie centrale du bosquet de la Salle de bal était à l’origine formée d’une île artificielle, sur laquelle furent posés quatre Vases tripodes à décor d’instruments de musique (Vjs 843), de même modèle. Dues à François Fontelle, ces sortes de grosses cassolettes furent ôtées au moment où la Salle de bal perdit son île, à la fin de l’année 170644. Inventaire des marbres issus de la démolition de l’île du bosquet de la Salle de bal en 1706. L’île figure sur le plan de Nicolas de Fer, gravé en 1705 par Charles Inselin, Plan général de Versailles, son parc, son louvre, ses jardins, ses fontaines, ses bosquets et sa ville. Les vases tripodes sont attestés dès 1707 à Marly par Jean-Aymar Piganiol de La Force (Piganiol de La Force, 1707, p. 388).. Elles figurent sur le tableau de Jean Cotelle (fig. 1) peint entre 1688 et 1691. Elles furent transférées à Marly, où elles prirent place au bas des escaliers de la terrasse du château avant de disparaître, probablement durant la période révolutionnaire.

Jardins de Versailles - Vue de la Salle de Bal avec Armide couronnant Renaud
fig. 1 - Jean Cotelle, Vue de la Salle de Bal avec Armide couronnant Renaud, 1688. Huile sur toile. Versailles, musée national des châteaux de Versailles et de Trianon, MV 732 © Château de Versailles, Dist. RMN-Grand Palais / Christophe Fouin

En 1702, Louis XIV demanda à son surintendant Jules Hardouin-Mansart de « rebronzer tous les vases et girandoles de la Salle de bal55. Registre des ordres de Louis XIV à Hardouin-Mansart, 1699-1702, 26 juin 1702. ».

En 1712, le groupe de La Paix des Grecs, dite aussi Papirius et sa mère (MR 1968) fut placé au bosquet de la Salle de bal, à l’ouest, sur un socle en marbre de Languedoc sculpté par Jean Hardy66. Mémoire de sculpture par Hardy, 1712-1.. Ce nouveau dispositif est visible sur une gravure de Jacques Rigaud (fig. 2). Le groupe de La Paix des Grecs provenait de l’entrée de l’allée Royale. D’après le modèle antique de la collection romaine des Ludovisi, par l’intermédiaire d’une version en plâtre conservée à la salle des Antiques du Louvre, il avait été sculpté par Benoît Massou, puis par Martin Carlier et Michel Monier.

Jardins de Versailles - La Salle du bal
fig. 2 - Jacques Rigaud, La Salle du bal, vers 1730. Gravure. Versailles, musée national des châteaux de Versailles et de Trianon, GR 150.36 © Château de Versailles, Dist. RMN-Grand Palais / Christophe Fouin

En vertu d’un arrêté de la Commission d’inspection des Anciens daté du 5 floréal an VI (24 avril 1798), le groupe de La Paix des Grecs fut transporté au jardin des Tuileries77. Boyer, 1935, p. 258-259..

Le socle du groupe de La Paix des Grecs était encore vacant au moment où fut rédigé l’inventaire de 1850. L’inventaire de 1857 y signale le groupe d’Amour jouant avec un satyre (MR 1987), provenant de la collection du comte d’Artois et tiré des réserves de Versailles.
Ce socle était vide en 1877 : cette année-là, en mars, l’architecte Charles-Auguste Questel réclama une statue mutilée de Centaure – peut-être le Centaure Albani (MR Sup. 128), alors présenté sur le parterre du Laocoon au Grand Trianon88. Correspondance des conservateurs du musée de Versailles, 1848-1852 et 1877-1878, n. p., lettre de Joseph-Henry Barbet de Jouy, conservateur de la Sculpture moderne au musée du Louvre à Louis Clément de Ris, conservateur du musée de Versailles, 28 mars 1877.. Sa demande resta sans suite mais, le mois suivant, le socle accueillit le Marsyas et Olympe Ludovisi de Jean-Baptiste Goy (MR 1821) provenant du bosquet du Rond-Vert99. Liste des travaux exécutés entre 1875 et 1880, mois d’avril 1877. Un document de 1893 (Liste des restaurations à exécuter aux sculptures des jardins de Versailles et Trianon, 20 février 1893) atteste encore au bosquet de la Salle de bal le groupe d’Amour jouant avec un satyre (MR 1987) : le descriptif des altérations correspondant au groupe du Marsyas et Olympe de Goy (MR 1821), le rédacteur a confondu les deux œuvres..

1. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. II, col. 173, paiement du 9 juillet 1682 à Houzeau relatif aux modèles élaborés en 1681.
2. Lettres, instructions et mémoires de Colbert, 1658-1683, t. VII, p. CLVIII, lettre du 13 mars 1682.
3. Brière, 1911, pl. 41.
4. Inventaire des marbres issus de la démolition de l’île du bosquet de la Salle de bal en 1706. L’île figure sur le plan de Nicolas de Fer, gravé en 1705 par Charles Inselin, Plan général de Versailles, son parc, son louvre, ses jardins, ses fontaines, ses bosquets et sa ville. Les vases tripodes sont attestés dès 1707 à Marly par Jean-Aymar Piganiol de La Force (Piganiol de La Force, 1707, p. 388).
5. Registre des ordres de Louis XIV à Hardouin-Mansart, 1699-1702, 26 juin 1702.
6. Mémoire de sculpture par Hardy, 1712-1.
7. Boyer, 1935, p. 258-259.
8. Correspondance des conservateurs du musée de Versailles, 1848-1852 et 1877-1878, n. p., lettre de Joseph-Henry Barbet de Jouy, conservateur de la Sculpture moderne au musée du Louvre à Louis Clément de Ris, conservateur du musée de Versailles, 28 mars 1877.
9. Liste des travaux exécutés entre 1875 et 1880, mois d’avril 1877. Un document de 1893 (Liste des restaurations à exécuter aux sculptures des jardins de Versailles et Trianon, 20 février 1893) atteste encore au bosquet de la Salle de bal le groupe d’Amour jouant avec un satyre (MR 1987) : le descriptif des altérations correspondant au groupe du Marsyas et Olympe de Goy (MR 1821), le rédacteur a confondu les deux œuvres.