Alexandre Maral, avec la collaboration de Cyril Pasquier
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Jardins de Versailles Bassin de Neptune

Bassin de Neptune

À l’extrémité septentrionale de l’axe nord-sud des jardins, au-delà du bassin du Dragon, un grand bassin fut creusé à partir de 1678 : cette « pièce d’eau sous le Dragon » fut dénommée « pièce des Sapins » avant de recevoir l’appellation de « bassin de Neptune ».

Les vases

Sa margelle supérieure, dédoublée pour former une rigole transversale, fut destinée à accueillir, à partir de 1682, vingt-deux vases de plomb (inv. 1850.9500 à inv. 1850.9521) servant de fontaines.
En 1686, l’« Estat présent du nombre des robinets et jet [sic] d’eau qui sont pozés dans le jardin de Versailles » précise que ces vases sont de plomb bronzé11. Inventaire des robinets et jets d’eau des jardins de Versailles, [1686], fol. 166ro..
Ces vases sont recensés par l’inventaire de 1694, qui donne la séquence suivante, chaque nom se rapportant à deux vases, deux masques et deux coquilles : Jean Collignon, François Lespingola, François Fontelle, Pierre Legros, Jean Cornu, Jean Raon, Laurent Magnier – associé à son fils Philippe –, Cornu, Cornu, Jean-Jacques Clérion et Jean-Baptiste Tuby –, mais ce dernier n’est pas nommé par les comptes des Bâtiments du roi.

À propos de ces vases, entre décembre 1682 et août 1683, les comptes des Bâtiments du roi mentionnent vingt-deux sculpteurs, mais chacun pour deux vases : Carlier, Clérion, Collignon, Cornu, Coysevox, Drouilly, Flamen, Fontelle, Houzeau, Hurtrelle, Laviron, Legros, Lespagnandelle, Lespingola, Magnier, Mazeline, Mazière, Monier, Prou, Raon, Regnaudin, Van Clève. Les parfaits paiements s’échelonnent de mai 1693 à janvier 1695.

Onze modèles différents de vases sont répétés de part et d’autre de l’axe central. En partant du centre, les vases sont ainsi répartis selon les modèles suivants :

Ces vases sont représentés avec minutie sur le tableau de Jean Cotelle commandé en 1688 pour Trianon, Vue du bassin du Dragon et du chéneau du bassin de Neptune avec Apollon terrassant le serpent Python (fig. 1).

Jardins de Versailles - Vue du bassin du Dragon et du chéneau du bassin de Neptune avec Apollon terrassant le serpent Python
fig. 1 - Jean Cotelle, Vue du bassin du Dragon et du chéneau du bassin de Neptune avec Apollon terrassant le serpent Python, 1688. Huile sur toile. Versailles, musée national des châteaux de Versailles et de Trianon, MV 770 © RMN-Grand Palais (Château de Versailles) / Gérard Blot

Il semble qu’il y ait eu deux séries de vases distinctes, l’une d’entre elles étant transférée en 1684 à Marly, où seize vases – ne correspondant pas aux modèles versaillais – furent installés sur les perrons autour de la grande pièce d’eau22. Maroteaux, 2009, p. 137. Plusieurs mouvements de vases sont signalés par les sources comptables en 1684 : vingt-deux vases de Versailles à Marly et deux de Trianon à la pièce de Neptune (Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. II, col. 458, paiement du 20 février 1684), huit vases de plomb de Marly à Versailles (ibid., paiement du 2 juillet 1684)..
Quatre autres vases furent par ailleurs disposés sur les piliers des grilles du Fer à cheval à Trianon (MR 3475, MR 3476, Vjs 1004 et Vjs 1005)33. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. II, col. 450, paiement du 23 janvier 1684 « à ceux qui ont transporté les vases et les cuvettes de plomb de la pièce de Neptune à Trianon et à la Ménagerie »..

À l’origine, tous les vases étaient pourvus d’anses. Les deux Vases ornés d’un triomphe marin en bas relief (inv. 1850.9505 et inv. 1850.9516) les ont perdues avant 1816.

Entre 1785 et 1787, tous les vases furent l’objet d’une intervention importante, certains d’entre eux ayant été refondus44. Registre du magasin des plombs, 1785-1789, fol. 4v-113..

Jardins de Versailles - Le bassin de Neptune en cours de restauration
fig. 2 - France-fin du xixe siècle, Le bassin de Neptune en cours de restauration, vers 1883-1888. Photographie. Versailles, musée national des châteaux de Versailles et de Trianon (Service des Archives), fonds Malitte-Richard, V 6262.18.13 © Château de Versailles / Christophe Fouin
Jardins de Versailles - Le bassin de Neptune en cours de restauration
fig. 3 - France-fin du xixe siècle, Le bassin de Neptune en cours de restauration, vers 1883-1888. Photographie. Versailles, musée national des châteaux de Versailles et de Trianon (Service des Archives), fonds Malitte-Richard, V 6262.18.12 © Château de Versailles / Christophe Fouin

À la fin du xixe siècle, le bassin de Neptune fut l’objet d’une restauration assez lourde (fig. 2 et 3) : « Lors de la reconstruction du célèbre bassin [de Neptune], poursuivie de 1883 à 1888, sous la direction de l’architecte [Alfred] Leclerc, les vases superbes qui ornent la tablette du chéneau, exécutés en 1684, furent tous réparés, des pièces refondues, la surface – malheureusement, et inévitablement – remise en forme au maillet, puis reciselée et passée à la carde. Tout ce travail fut accompli soigneusement par les ouvriers de la maison Bocquet, mais contribua à enlever aux plombs leur ancien modelé, ferme et gras. Un seul vase fut refait à neuf [inv. 2014.00.1019], l’original [inv. 1850.9518] ayant été jugé trop affaissé pour être restauré. Le piédestal a été redressé, les anses ressoudées, et ce vase consolidé est maintenant mis sous les yeux des artistes : il atteste la valeur du travail de fonte et de reprise au ciseau accompli à la fin du xviie siècle55. Brière, Pératé, 1922, p. 20.. »
Le vase original (inv. 1850.9518) est désormais en réserve. Il a hélas été lourdement restauré en 1981.
Le vase refait (inv. 2014.00.1019) dans le cadre de la restauration de 1883 est aujourd’hui en place au bassin de Neptune, côté est. Il est nettement moins beau que l’original qu’il remplace, ainsi que son double (inv. 1850.9503), disposé côté ouest.

En 1954, l’entreprise Fonderie et Restauration d’art intervint sur six vases du bassin de Neptune. Il est impossible de savoir quels vases furent concernés par cette restauration qui consista notamment en la « remise en forme des parties ornementées, déformées ou affaissées »55. Soumission pour travaux de plomberie d’art par l’entreprise Fonderie et Restauration d’art, 22 février 1954..

Les mascarons et les coquilles

En 1684, les sources comptables attestent la mise en place de vingt-quatre coquilles de plomb au bassin de Neptune66. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. II, col. 429, paiement du 10 septembre 1684 à François Potage..
Un paiement de 1684 rétribue ceux qui ont « travaillé à ranger les vazes, coquilles, masques et tables de plomb au-dessus [sic] de la pièce du Dragon77. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. II, col. 450, paiement du 30 janvier 1684. ».
En 1686, l’« Estat présent du nombre des robinets et jet [sic] d’eau qui sont pozés dans le jardin de Versailles » précise que ces coquilles, au nombre d’au moins vingt-deux, sont de plomb bronzé88. Inventaire des robinets et jets d’eau des jardins de Versailles, [1686], fol. 166ro..

L’inventaire de 1694 indique aussi la présence de vingt-deux mascarons et de vingt-deux coquilles, dus aux mêmes sculpteurs.

La disposition des vases, vasques, mascarons et coquilles est fidèlement représentée sur le tableau de Jean Cotelle commandé en 1688 pour Trianon, Vue du bassin de Neptune, du bassin du Dragon et de l’allée d’Eau avec le jugement de Pâris (fig. 4)99. Cotelle, 1688-11., ainsi que sur celui de Jean-Baptiste Martin, Vue perspective du château de Versailles depuis le bassin de Neptune1010. Martin, [1685-1689]..

Jardins de Versailles - Vue du bassin de Neptune, du bassin du Dragon et de l’allée d’Eau avec le jugement de Pâris
fig. 4 - Jean Cotelle, Vue du bassin de Neptune, du bassin du Dragon et de l’allée d’Eau avec le jugement de Pâris, 1688. Huile sur toile. Versailles, musée national des châteaux de Versailles et de Trianon, MV 771 © Château de Versailles, Dist. RMN-Grand Palais / Christophe Fouin

Le mur de soutènement, tapissé de congélations, est en effet orné de vingt-quatre masques (inv. 1850.9542 à inv. 1850.9565), dont vingt-deux crachant l’eau dans autant de grandes vasques (inv. 1850.9522 à inv. 1850.9541 ; 2012.00.667 et 2012.00.668) en forme de coquilles placées en contrebas.

Les deux mascarons (inv. 1850.9544 et inv. 1850.9563) qui ne crachent pas l’eau semblent avoir été ajoutés tardivement. D’un modèle identique, ils sont du reste d’une iconographie différente de celle des vingt-deux autres et ne portent aucune numérotation.
Ils ne sont mentionnés explicitement par aucune source avant l’inventaire de 1850.

L’inventaire de 1850 n’atteste que vingt « coquilles » sur les vingt-deux inventoriées en 1694 et encore en place de nos jours. Les travaux de réfection du bassin de Neptune ayant commencé par sa partie centrale en 1848-1852 (réfection visible sur une photographie d’Alphonse Davanne datant de 1852-1854, fig. 5), il est probable qu’au moment de la rédaction de l’inventaire deux des vasques de la partie saillante du bassin, celles qui encadrent le groupe de Neptune et Amphitrite, aient été déposées.

Jardins de Versailles - Le bassin de Neptune
fig. 5 - Louis-Alphonse Davanne, Le bassin de Neptune, vers 1852-1854. Photographie. Paris, Collection Société française de photographie (coll. SFP), FRSFP_0094im_050-04 © Société française de photographie

En 1701, le guide de Jean-Aymar Piganiol de La Force rapporte en outre, « dans les angles de la tablette, huit grandes coquilles pour recevoir l’eau qui tombe des vases qui sont au-dessus1111. Piganiol de La Force, 1701, p. 182-183. ». L’édition de 1730 les relève encore1212. Piganiol de La Force, 1730, t. II, p. 32..
L’édition de 1738 et les suivantes indiquent que ces huit coquilles ne sont plus en place1313. Piganiol de La Force, 1738, t. II, p. 32..

Les sculptures de plomb

En 1683 et 1684, les sources comptables mentionnent aussi au moins onze modèles de plâtre destinés à préfigurer les groupes définitifs du bassin de Neptune :

  • Un modèle par Philippe Caffieri, Pierre Cotton et Jean Légeret (Vjs 769) ;
  • Un modèle par Martin Carlier et Michel Monier, Deux Tritons (Vjs 752) ;
  • Un modèle par Jean-Jacques Clérion et François Lespingola (Vjs 753) ;
  • Un modèle par Jean Cornu (Vjs 756) ;
  • Un modèle par Antoine Coysevox, Neptune (Vjs 885) ;
  • Un modèle par François Fontelle et Simon Mazière – ce dernier s’étant associé à Jean Dedieu –, Un fleuve et une rivière (Vjs 758) ;
  • Un modèle par Jean Hardy et Matthieu Lespagnandelle (Vjs 764) ;
  • Un modèle par Jacques Houzeau et Jean Raon, Amphitrite (Vjs 766) ;
  • Un modèle par Pierre Laviron et Corneille Van Clève (Vjs 768) ;
  • Un modèle par Pierre Legros et Benoît Massou (Vjs 886).
  • Un modèle par Jacques Prou (Vjs 1286).

En 1684, le sculpteur Venier fut rétribué pour restauration et réparation de huit modèles de groupes déjà installés sur le bassin de Neptune1414. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. II, col. 478, paiement du 5 mars 1684..
Placés à titre d’essai, ces modèles devaient faire partie d’un ensemble célébrant le triomphe de Neptune et d’Amphitrite, dont l’iconographie des vases constitue, par bien des détails, le commentaire.
Ils correspondent probablement aux « groupes de figures de triomphe marins [sic] » attestés en 1686 contre le mur de soutènement du bassin de Neptune, « en 3 distances esgalles1515. Inventaire des robinets et jets d’eau des jardins de Versailles, [1686], fol. 166. ».
Selon le compte rendu de la visite des ambassadeurs de Siam, publié en novembre 1686, la pièce de Neptune « est ainsi nommée parce qu’on y doit placer un Neptune avec ses attributs1616. Mercure galant, novembre 1686, p. 193-194. ».

Jardins de Versailles - Vue et perspective des nouvelles cascades de Versailles
fig. 6 - Nicolas de Poilly, Veue et perspective des nouvelle [sic] cascades de Versailles, vers 1685. Gravure. Versailles, musée national des châteaux de Versailles et de Trianon, GR 138.50 © Château de Versailles, Dist. RMN-Grand Palais / Christophe Fouin

Non datée, mais probablement exécutée vers 1685-1690, la gravure de Nicolas de Poilly intitulée Veue et perspective des nouvelle [sic] cascades de Versailles (fig. 6) montre contre le mur de soutènement du bassin de Neptune onze groupes et figures qui évoquent des thèmes maritimes et dont la composition centrale paraît représenter Neptune tenant son trident et conduisant un attelage.

Aucune suite ne fut donnée au projet avant 1735, d’autres sculpteurs, travaillant à partir d’autres modèles, étant alors sollicités pour achever le décor du bassin.

Le programme sculpté du bassin de Neptune fut mené à terme à partir de 17351717. Mémoire relatif aux modèles exécutés sous la conduite de Lambert-Sigisbert Adam entre septembre 1735 et mai 1736. Pour autant, les modèles ne sont explicitement cités par les sources comptables qu’à partir de 1737 (Grand état de la dépense des Bâtiments du Roi, 1737, p. 206 : « Les models à continuer à la pièce de Neptune et conduittes à poser pour les effets d’eau, à compte pour l’année 1737... 12 500 [livres] »).. Il fut orné de cinq groupes.
Le groupe central, Neptune et Amphitrite (inv. 1850.9495), fut exécuté par les frères Adam, Lambert-Sigisbert et Nicolas-Sébastien.
Deux groupes de Dragon marin dompté par un Amour (inv. 1850.9498 et inv. 1850.9499) et le groupe de Protée (inv. 1850.9497) furent exécutés par Edme Bouchardon et son frère Jacques-Philippe1818. Lindblom, 1924, p. 10 (lettre de Jean-Baptiste Bouchardon, père des deux sculpteurs, à son fils Edme mentionnant la collaboration de son frère). Voir aussi Ronot, 2002, t. II, p. 125..
Le groupe d’Océan (inv. 1850.9496) fut sculpté par Jean-Baptiste Lemoyne.
L’ensemble fut achevé en 17411919. Grand état de la dépense des Bâtiments du Roi, 1742, p. 58-59 : « Suplément [sic] à faire pour le parfait payement des ouvrages de sculpture de la pièce de Neptune faits en 1741 et non compris dans l’État du Roi de lad[ite] année... 12 500 [livres]. ».
Les sculpteurs furent également chargés du travail des enrochements2020. Grand état de la dépense des Bâtiments du Roi, 1738, p. 207-208 (« Aux Sr Bouchardon, Adam et Le Moine, sculpteurs, à compte sur les ouvrages en plomb et étaim [sic] qu’ils font pour les grouppes de la pièce de Neptune, masses de rochers à faire en pierre dure au pied pour les porter, compris les étayemens pour reprendre les murs, les gros fers pour armatures, agraphes, équipages et models nécessaires en plâtre... 30 000 [livres] ») ; Grand état de la dépense des Bâtiments du Roi, 1739, p. 290 (« Aux Srs Bouchardon, Adam et Le Moine, à compte sur les ouvrages en plomb et étaim [sic] pour les grouppes de la pièce de Neptune, taille des rochers en pierre et fournitures nécessaires auxd[its] ouvrages, quarantes mil livres, cy... 40 000 [livres] »)..

Plusieurs modèles en rapport avec les sculptures du bassin de Neptune sont à signaler :

  • Un triton et une néréide couchés aux côtés d’un hippopotame, terre cuite de Bouchardon présentée au Salon de 1738 ; ce modèle ayant été jugé trop important pour le bassin, il fut remplacé par Protée2121. Lami, 1910-1911, t. I, p. 105..
  • Un enfant sur le dos d’un dauphin, terre cuite de Bouchardon présentée au Salon de 1738 ; premier projet des groupes placés aux extrémités2222. Lami, 1910-1911, t. I, p. 105..
  • Les modèles en plâtre des deux groupes de Dragon marin dompté par un Amour de Bouchardon, mentionnés en 1924 en Suède2323. Lindblom, 1924, p. 6 et 8..

Enfin, six figures de Dragon sont représentées sur le dessin (fig. 7) du bassin de Neptune par Jacques-André Portail, ainsi que sur la gravure, non datée, de Jacques Rigaud. Ces figures correspondent aux départs des jets d’eau du milieu du bassin. Elles ne sont mentionnées par aucune autre source, si bien qu’elles ne font pas l’objet de notices dans le présent catalogue.

Jardins de Versailles - Vue panoramique de Versailles depuis le bassin de Neptune
fig. 7 - Jacques-André Portail, Vue panoramique de Versailles depuis le bassin de Neptune, 1742. Dessin. Versailles, musée national des châteaux de Versailles et de Trianon, inv. dess. 725 © Château de Versailles, Dist. RMN-Grand Palais / Christophe Fouin

Les sculptures en marbre

L’inventaire de 1686 signale la statue de Louis XIV sous les traits de Marcus Curtius (MR 1758) à l’arrière du bassin de Neptune. Elle est alors désignée comme « une figure équestre d’un grand cheval, et dessus est un empereur ».
Elle provenait du parterre de l’Orangerie.
Elle fut transformée en un Marcus Curtius par François Girardon, rétribué en janvier 1688 « pour son remboursement des journées de sculpteurs qui ont travaillé sous luy […] à refaire la teste de la figure du cavalier Bernin2424. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. III, col. 94, paiement du 4 janvier 1688. ».
Sa transformation par Girardon est attestée par Nicodème Tessin, qui visita Versailles en septembre 16872525. Relation de Tessin, 1687, p. 165..
Moyennant le remplacement de la chevelure par un casque et la transformation des rochers et des étendards en flammes, Louis XIV fut travesti en Marcus Curtius.
Le récent bassin de Neptune, à l’extrémité duquel l’œuvre fut placée, signifiait à la fois le gouffre dans lequel le héros romain s’apprêtait à se précipiter et le lac qui en prendrait la place grâce au sacrifice de sa vie. L’œuvre est visible sur le tableau (fig. 8) d’Étienne Allegrain, Promenade de Louis XIV en vue du parterre du Nord, commandé en 1688 pour Trianon.

Jardins de Versailles - Promenade de Louis XIV en vue du parterre du Nord
fig. 8 - Étienne Allegrain, Promenade de Louis XIV en vue du parterre du Nord, 1688. Huile sur toile. Versailles, musée national des châteaux de Versailles et de Trianon, MV 752 © RMN-Grand Palais (Château de Versailles) / Gérard Blot

L’inventaire de 1686 recense également les statues d’Hercule (Vjs 806) et de Bacchus (Vjs 826), remplacées avant 1694. La statue d’Hercule fut transférée avant cette date aux allées d’Apollon au Grand Canal, celle de Bacchus sur l’allée Royale. Les deux statues ne sont plus localisées aujourd’hui.
D’après le plan non daté (fig. 9) qui porte les numéros de l’inventaire de 1686, Hercule était situé côté ouest et Bacchus côté est.

Jardins de Versailles - Bassin de Neptune
fig. 9 - Agence des Bâtiments du roi, Bassin de Neptune, [1686]. Dessin. Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Estampes et de la Photographie, FOL-VA-78 (F, 3), microfilm B 10301 © Bibliothèque nationale de France

Avant 1694, la Junon Cesi (MR 2033) prit la place de Bacchus et la Cérès Mattei (MR 1859) celle d’Hercule.
Junon et Cérès provenaient de l’allée Royale, où elles sont attestées par l’inventaire de 1686.

En 1702, provenant de l’extrémité occidentale de l’allée Royale, le groupe de La Renommée du roi (MR 1874) de Domenico Guidi fut installé à l’arrière du bassin de Neptune.
Il remplaça la statue équestre du Bernin (MR 1758), transférée à l’extrémité de la pièce d’eau des Suisses.
En septembre 1792, les sculpteurs Jules-Hugues et Jean-Siméon Rousseau furent chargés d’« effacer à l’outil, en y laissant du bossage pour d’autres allégories, le portrait en marbre de Louis XIV » qui avait été sculpté sous la direction de Girardon2626. Mémoire de Jules-Hugues et Jean-Siméon Rousseau, 10 août-31 décembre 1792..
En 1795, il fut décidé que « les restes du médaillon de Louis XIV seroient convertis en un faisceau représentant les 86 départemens avec ces lettres initiatives RF2727. Journal personnel de Lagarde, 1795, fol. 164vo, 165vo et 166. ».
Le médaillon de Girardon fut restitué en 1816 par Jean-François Lorta2828. Pièces relatives à la restitution du médaillon principal de la Renommée du Roi, avril-juillet 1816 (en particulier, lettre du marquis de Cubières du 23 juillet 1816 ; voir aussi Pierrefitte-sur-Seine, Archives des musées nationaux - château de Versailles et Trianon (séries V et VT), 20150040/3, correspondance, avril-mai 1816)..

1. Inventaire des robinets et jets d’eau des jardins de Versailles, [1686], fol. 166ro.
2. Maroteaux, 2009, p. 137. Plusieurs mouvements de vases sont signalés par les sources comptables en 1684 : vingt-deux vases de Versailles à Marly et deux de Trianon à la pièce de Neptune (Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. II, col. 458, paiement du 20 février 1684), huit vases de plomb de Marly à Versailles (ibid., paiement du 2 juillet 1684).
3. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. II, col. 450, paiement du 23 janvier 1684 « à ceux qui ont transporté les vases et les cuvettes de plomb de la pièce de Neptune à Trianon et à la Ménagerie ».
4. Registre du magasin des plombs, 1785-1789, fol. 4v-113.
5. Brière, Pératé, 1922, p. 20.
6. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. II, col. 429, paiement du 10 septembre 1684 à François Potage.
7. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. II, col. 450, paiement du 30 janvier 1684.
8. Inventaire des robinets et jets d’eau des jardins de Versailles, [1686], fol. 166ro.
9. Cotelle, 1688-11.
10. Martin, [1685-1689].
11. Piganiol de La Force, 1701, p. 182-183.
12. Piganiol de La Force, 1730, t. II, p. 32.
13. Piganiol de La Force, 1738, t. II, p. 32.
14. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. II, col. 478, paiement du 5 mars 1684.
15. Inventaire des robinets et jets d’eau des jardins de Versailles, [1686], fol. 166.
16. Mercure galant, novembre 1686, p. 193-194.
17. Mémoire relatif aux modèles exécutés sous la conduite de Lambert-Sigisbert Adam entre septembre 1735 et mai 1736. Pour autant, les modèles ne sont explicitement cités par les sources comptables qu’à partir de 1737 (Grand état de la dépense des Bâtiments du Roi, 1737, p. 206 : « Les models à continuer à la pièce de Neptune et conduittes à poser pour les effets d’eau, à compte pour l’année 1737... 12 500 [livres] »).
18. Lindblom, 1924, p. 10 (lettre de Jean-Baptiste Bouchardon, père des deux sculpteurs, à son fils Edme mentionnant la collaboration de son frère). Voir aussi Ronot, 2002, t. II, p. 125.
19. Grand état de la dépense des Bâtiments du Roi, 1742, p. 58-59 : « Suplément [sic] à faire pour le parfait payement des ouvrages de sculpture de la pièce de Neptune faits en 1741 et non compris dans l’État du Roi de lad[ite] année... 12 500 [livres]. »
20. Grand état de la dépense des Bâtiments du Roi, 1738, p. 207-208 (« Aux Sr Bouchardon, Adam et Le Moine, sculpteurs, à compte sur les ouvrages en plomb et étaim [sic] qu’ils font pour les grouppes de la pièce de Neptune, masses de rochers à faire en pierre dure au pied pour les porter, compris les étayemens pour reprendre les murs, les gros fers pour armatures, agraphes, équipages et models nécessaires en plâtre... 30 000 [livres] ») ; Grand état de la dépense des Bâtiments du Roi, 1739, p. 290 (« Aux Srs Bouchardon, Adam et Le Moine, à compte sur les ouvrages en plomb et étaim [sic] pour les grouppes de la pièce de Neptune, taille des rochers en pierre et fournitures nécessaires auxd[its] ouvrages, quarantes mil livres, cy... 40 000 [livres] »).
21. Lami, 1910-1911, t. I, p. 105.
22. Lami, 1910-1911, t. I, p. 105.
23. Lindblom, 1924, p. 6 et 8.
24. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. III, col. 94, paiement du 4 janvier 1688.
25. Relation de Tessin, 1687, p. 165.
26. Mémoire de Jules-Hugues et Jean-Siméon Rousseau, 10 août-31 décembre 1792.
27. Journal personnel de Lagarde, 1795, fol. 164vo, 165vo et 166.
28. Pièces relatives à la restitution du médaillon principal de la Renommée du Roi, avril-juillet 1816 (en particulier, lettre du marquis de Cubières du 23 juillet 1816 ; voir aussi Pierrefitte-sur-Seine, Archives des musées nationaux - château de Versailles et Trianon (séries V et VT), 20150040/3, correspondance, avril-mai 1816).