Bosquet de l’Étoile
Dit aussi bosquet de la Gerbe, ou encore bosquet de la Montagne d’Eau (à ne pas confondre avec l’appellation secondaire du bosquet de l’Obélisque), le bosquet de l’Étoile fut aménagé à partir de 167111. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. I, col. 522.. Il est situé dans la partie basse des jardins, au nord. Il ne comportait à l’origine aucune sculpture, à l’exception de vases de cuivre exécutés par le fondeur Nicolas Le Maire en 1671 et déposés « de dessus les corniches de la Montagne » en 167422. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. I, col. 520 et 809..
La première sculpture mentionnée au bosquet de l’Étoile est le buste de Mars, dit aussi Alexandre (Vjs 852)33. Maral, 2006, p. 67..
D’origine inconnue, attribué à Phidias par Jean-Aymar Piganiol de La Force, ce buste fut doté en 1684 d’une cuirasse et d’un cimier en forme de coq en bronze doré, dont les modèles furent élaborés par François Girardon et exécutés par trois fondeurs associés, François Langlois, Nicolas Meusnier et Pierre Varin.
Le buste d’Alexandre fut placé au sommet d’une colonne de marbre de Languedoc due au sculpteur Jean Raon.
L’inventaire de 1686 signale quatre sculptures au bosquet de l’Étoile :
- le terme de Jupiter (MR 251), formé d’un buste antique provenant de Besançon, attribué à Phidias, et d’une gaine sculptée par Jean Drouilly ;
- la statue du « Sacrificateur de Bourguesse », copiée à Rome d’après l’antique du Capitole, et non d’après l’antique de la collection Borghèse, par Jean-Baptiste Goy (Vjs 853)44. La copie de Goy a été faite à partir du bronze antique du Capitole, et non pas à partir des versions en marbre (aujourd’hui au musée du Louvre, département des Antiquités grecques, étrusques et romaines, MR 119 et MR 120) de la collection Borghèse (Correspondance des directeurs de l’Académie de France à Rome, 1666-1793, t. I, 1887, p. 129). ;
- la statue de Diane chasseresse (Vjs 1188) ;
- le buste d’Alexandre (Vjs 852).
Les statues du Sacrificateur du Capitole et de Diane chasseresse ne sont plus connues que par le recueil de Simon Thomassin55. Thomassin, 1694, pl. 11 et 18.. Elles quittèrent Versailles avant 1694, date de l’Estat général qui ne les mentionne pas, et sont attestées à Marly par l’Estat des figures daté de 1695.
Les emplacements des quatre sculptures signalées en 1686 au bosquet de l’Étoile sont indiqués par le « Plan de l’Étoille » (fig. 1) qui fait partie du recueil de plans datable vers 1690 : ils étaient tous établis sur l’allée circulaire périphérique et formaient des fonds de perspective aux quatre accès situés aux angles du bosquet.
L’Estat général de 1694 indique quatre sculptures au bosquet de l’Étoile :
- no 155 : le buste d’Alexandre (Vjs 852) ;
- no 156 : la statue antique de Livie (MR 298) ;
- no 157 : le terme de Jupiter (MR 251) ;
- no 158 : la statue de la Vénus Médicis (MR 1995).
La statue de Livie avait été gravée par Claude Mellan aux Tuileries en 1669.
Copiée d’après l’antique, la statue de la Vénus Médicis (MR 1995) provenait des allées d’Apollon au Grand Canal.
Ces deux œuvres remplaçaient donc le Sacrificateur du Capitole (Vjs 853) et la Diane chasseresse (Vjs 1188).
Il est impossible de savoir comment ces sculptures étaient réparties sur les quatre emplacements figurés sur le plan datable vers 1690.
Entre 1701 et 1707, le terme de Jupiter (MR 251) fut transféré au bosquet voisin du Théâtre d’eau. Il fut remplacé par la copie du Ganymède Médicis due à Jean Joly (MR 2002), attestée par l’édition de 1707 du guide de Piganiol de La Force.
En 1704, le bassin central, modifié, reçut une sculpture d’enfant de plomb, qui peut être identifiée à l’une des figures secondaires (Vjs 312) du bassin de l’Automne et qui fut alors restaurée et ornée de raisins et de feuilles de vigne pour cacher son support métallique66. Grand état de la dépense ordinaire des Bâtiments du roi, 1704, fol. 279, no 10.. À partir de 1707, cette sculpture d’enfant est mentionnée sur le parterre bas des jardins de Trianon. Par ailleurs, les cinq bassins périphériques du bosquet de l’Étoile reçurent chacun, en 1704, une sculpture en plomb représentant un bouquet de fleurs, qui fut alors revêtue de dorure et polychromée77. Grand état de la dépense ordinaire des Bâtiments du roi, 1704, fol. 279, no 11.. Il n’est pas impossible que ces éléments de plomb aient été transférés du bassin du Printemps. Ils furent probablement déposés dès 1705, au moment du remplacement des bassins périphériques par des piédestaux de marbre88. Recette et dépense du magasin (cuivres), 1700-1713, Dépense, février 1705..
L’édition de 1707 du guide de Piganiol de La Force indique quatre nouvelles sculptures, disposées dans la partie centrale du bosquet, à l’emplacement de quatre fontaines supprimées :
Ces sculptures ont été installées en 170799. Mémoire des ouvrages faits en 1707..
Le plan (fig. 2) du recueil de Pierre Lepautre daté de 1711 mentionne et situe huit sculptures au bosquet de l’Étoile.
Dans l’allée circulaire :
- le groupe du Ganymède Médicis de Jean Joly (MR 2002) à l’entrée sud-est ;
- la copie de la statue de la Vénus Médicis (MR 1995) à l’entrée nord-est ;
- la statue de Livie (MR 298) à l’entrée nord-ouest ;
- le buste d’Alexandre (Vjs 852) à l’entrée sud-ouest.
Dans quatre des angles de l’allée pentagonale, face à des allées menant au centre du bosquet :
- La Comédie (MR 300) au nord ;
- une Bacchante (MR 103) au sud ;
- une Vestale (Vjs 819) au sud-ouest ;
- Uranie (MR 364) au nord-ouest.
Jusqu’à son remplacement, entre 1701 et 1707, par le Ganymède Médicis (MR 2002), il est donc permis de penser que le terme de Jupiter (MR 251) a été disposé à l’entrée sud-est.
Dessiné par le fontainier Dominique Girard en 1714 et gravé par Jean Raymond, le Plan général des jardins, bosquets et pièces d’eau du petit parc de Versailles (fig. 3) permet de savoir que la statue d’Artémise (MR 199) a remplacé le buste d’Alexandre (Vjs 852) entre 1711 et 1714. Artémise (MR 199) fut probablement installée au bosquet de l’Étoile en novembre 1714.1010. État des sorties des magasins de Versailles, novembre 1714, p. 89 (délivrance de plomb à Delacroix, inspecteur du petit parc de Versailles, le 10 novembre 1714 « pour poser une figure dans le bosquet de l’Étoille ».)
Encore attesté au bosquet de l’Étoile par l’édition de 1713 du guide de Piganiol de La Force, le buste d’Alexandre (Vjs 852) ne figure plus sur le plan de 1714 : transféré dans les Salles vertes de Trianon, il fut remplacé, à l’entrée sud-ouest du bosquet de l’Étoile, par la statue d’Artémise (MR 199). Due au sculpteur Dominique Lefebvre, cette dernière provenait des jardins de Marly, où elle est mentionnée, sous le titre de « Pandore », par le guide de Piganiol de La Force dès 1701 et par l’inventaire de 1707. Elle est également dénommée « Psyché » par l’inventaire de 1722.
Le plan gravé de Contant de La Motte, en 1783, est conforme à celui de 1714.
Selon le Coup d’œil sur les peintures et sculptures qui décorent les châteaux, jardins, bosquets et fontaines de Versailles, Marly, Trianon et la Ménagerie rédigé en 1787 par Louis-Jacques Durameau, une « figure antique entièrement drapée » est située à l’entrée nord-est du bosquet, à la place de la Vénus Médicis (MR 1995)1111. Description par Durameau, 1787, p. 143. Peut-être la « statue de femme, sujet inconnu » signalée au même emplacement par Nicolas-François Dupré (État des restaurations à faire aux sculptures en marbre des jardins de Versailles et Trianon par Dupré en 1785-1786).. Cette dernière est alors localisée aux Salles vertes de Trianon, dans la Salle des Trois-Salons1212. Description par Durameau, 1787, p. 168..
Signalée seulement par Durameau, la « figure antique entièrement drapée » ne fait pas l’objet d’une notice. Il pourrait s’agir d’une statue provenant des Salles vertes de Trianon, installée au bosquet de l’Étoile en échange de la Vénus Médicis (MR 1995).
Dans son édition de 1797, l’Almanach de Versailles indique encore huit sculptures au bosquet de l’Étoile1313. Almanach de Versailles, 1797, p. 17. : Artémise (MR 199), Ganymède de Joly (MR 2002), Vénus Médicis (MR 1995), Livie (MR 298), Uranie (MR 364), La Comédie (MR 300), Bacchante (MR 103) et une antique, non désignée (Vjs 819). En décembre 1799, les statues de Livie (MR 298), d’Uranie (MR 364) et de Vestale (Vjs 819) furent pressenties pour être transférées au musée du Louvre1414. Procès-verbaux du conseil d’administration du Musée central des arts, juin 1798-septembre 1800, p. 242-245 (séance du 6 décembre 1799), à la p. 243.. Absentes de l’édition de 1800 de l’Almanach de Versailles, elles furent vraisemblablement retirées du bosquet de l’Étoile à la fin de l’année 1799. Si Livie fut effectivement transférée au musée du Louvre, où elle est encore conservée aujourd’hui, l’historique de la Vestale est inconnu après 1799. De nouveau signalée au bosquet de l’Étoile par le Cicerone de Versailles, la statue d’Uranie ne fut peut-être pas envoyée à Paris. Elle figure néanmoins en 1810 dans la liste des sculptures dont le retour à Versailles est sollicité1515. Liste des sculptures disparues des jardins de Versailles à remplacer, 3 septembre 1810..
Le Cicerone de 1804 ne signale, sans les situer précisément, que trois sculptures au bosquet de l’Étoile : Ganymède de Joly (MR 2002), Uranie (MR 364) et la Bacchante (MR 103)1616. Duchesne, 1804, p. 82-83..
La statue de Pandore, dite aussi Psyché ou Artémise (MR 199), est mentionnée par l’inventaire MR dans les magasins de Versailles. Transférée par la suite à Saint-Cloud, où elle est attestée en 1845, revenue à Versailles en 1872, elle a été déposée en mai 2005 au musée du Louvre.
Selon l’inventaire de 1810, la statue de Livie (MR 298) est alors conservée au musée du Louvre.
Retirée du bosquet de l’Étoile entre 1797 et 1800, La Comédie (MR 300) est mentionnée au musée du Louvre par l’inventaire MR. Il n’est pas impossible qu’elle y ait été envoyée au détriment d’Uranie (MR 364). Non identifiée et actuellement non localisée, la mystérieuse « figure antique entièrement drapée » indiquée par Durameau à la place de la Vénus Médicis (MR 1995) quitta elle aussi le bosquet de l’Étoile avant 1804.
Le nombre de trois sculptures est confirmé par le recueil de Michel-Antoine Garreau, daté de 18161717. Garreau, 1816, p. 298-301.. Garreau ne fait mention que d’une seule sculpture dans l’allée circulaire, le groupe du Ganymède Médicis de Joly (MR 2002), curieusement situé à l’entrée nord-est. Garreau mentionne les deux autres sculptures dans l’allée pentagonale : la statue d’Uranie (MR 364) et la statue de Bacchante (MR 103).
L’inventaire datable de 1819 indique quatre sculptures au bosquet de l’Étoile1818. Inventaire des sculptures des jardins de Versailles, [1819]. : le groupe du Ganymède Médicis de Joly (MR 2002), la statue d’Uranie (MR 364), la statue de Bacchante (MR 103), le groupe de Marsyas et Olympe de Goy (MR 1821). Il s’agit de la seule mention de ce dernier groupe au bosquet de l’Étoile.
Selon l’édition de 1821 du Cicerone, le bosquet de l’Étoile comportait six sculptures1919. Duchesne, 1821, p. 114-115..
Dans l’allée circulaire :
- le groupe du Ganymède Médicis de Joly (MR 2002) du côté du bassin de Cérès, c’est-à-dire dans l’angle sud-est ;
- une statue de Bacchus (MR 114), du côté du bassin de Flore, c’est-à-dire dans l’angle sud-ouest.
Dans l’allée pentagonale :
Cette liste est confirmée par l’inventaire de 1850.
Il est possible de localiser exactement ces œuvres grâce au plan publié par Charles Picquet en 1821.
Des deux sculptures de l’allée circulaire, le Bacchus (MR 114) provenait de la collection Mazarin, dont il porte un numéro gravé. Encore au bosquet de l’Étoile en 1850 (inv. 1850.9597), il fut transféré en réserve et remplacé en 1853 par la Minerve de Claude Bertin (MR 1760). Cette dernière fut à son tour transférée en réserve en 1906.
L’autre sculpture de l’allée circulaire, le Ganymède Médicis de Joly (MR 2002), est encore en place selon la deuxième édition du catalogue de Soulié en 1861. Elle fut transférée en 1877 au bosquet du Rond-Vert pour y remplacer le groupe de Marsyas et Olympe (MR 1821)2020. Liste des travaux exécutés entre 1875 et 1880, mois d’avril 1877.. Depuis 2007, l’œuvre a été mise à l’abri.
À partir de 1877, le socle du Ganymède Médicis fut occupé par l’Apollon de Guillaume Coustou (MR 1812). Commandé pour les jardins de Bellevue en 1751, ce dernier était passé par Saint-Cloud. En 1885, l’auteur du Programme du jeu des eaux du parc contenant la description des palais et jardins de Versailles et de Trianon y voit une représentation de la muse Érato, qu’il attribue à Jean Joly d’après l’antique, par confusion avec le Ganymède Médicis2121. Programme du jeu des eaux, 1885, p. 12.. L’Apollon de Coustou fut retiré du bosquet de l’Étoile avant 1920, date d’une recensement des piédestaux vides des jardins de Versailles.
Dans l’allée pentagonale, la statue d’Apollon (MR 90) fut placée sur le socle sud-ouest. Elle provenait de la collection Mazarin. Elle fut mise à l’abri en 18942222. Correspondance des conservateurs du musée de Versailles, 1893-1903, n. p., lettres de Pierre de Nolhac, conservateur du musée de Versailles, à Marcel Lambert, architecte en chef du domaine de Versailles, 2 et 3 juillet 1894.. Elle est depuis lors conservée en réserve à Versailles.
En 1894, la statue d’Apollon fut remplacée par celle du Faune grec Mazarin (MR 1917)2323. Correspondance des conservateurs du musée de Versailles, 1893-1903, n. p., lettre de Pierre de Nolhac, conservateur du musée de Versailles, à Marcel Lambert, architecte en chef du domaine de Versailles, 3 juillet 1894.. Cette dernière fut mise à l’abri en 19372424. Lettre de Rudier à Brière du 12 février 1937 ; Notes de Brière des 12 février et 12 avril 1937..
La statue d’Uranie (MR 364) se trouvait sur le socle nord-ouest de l’allée pentagonale. Elle est encore située à cet emplacement en 1903 par le plan du guide de Masson (fig. 4). Victime d’une chute en 1917, elle disparaît ensuite, sans laisser de traces2525. Procès-verbal du 30 novembre 1917..
La statue de Mercure (MR 277) était située sur le socle nord-est de l’allée pentagonale, à l’emplacement précédemment occupé par la statue de La Comédie (MR 300).
Victime d’un acte de vandalisme au cours des années 1970, la statue de Mercure fut déposée avant 19792626. Pinatel, 1979, p. 132..
La statue de Muse à la nébride, dite autrefois Bacchante (MR 103), était sur le socle sud de l’allée pentagonale. Elle a été mise à l’abri en 2006, trois siècles après sa mise en place au bosquet de l’Étoile.