Alexandre Maral, avec la collaboration de Cyril Pasquier
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Jardins de Versailles Bosquets disparus Bosquet de la Salle du Conseil

Bosquet de la Salle du Conseil

Dit aussi bosquet de la Salle des Festins, le bosquet de la Salle du Conseil fut aménagé à partir de 167111. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. I, col. 517..
Il est ainsi décrit par le guide d’André Félibien en 167422. Félibien, 1674, p. 75-76. : « Le milieu est comme une isle fermée d’un fossé d’eau, avec des ponts qui avancent et reculent d’une manière toute particulière. II y a, en quatre endroits de la place qui environne l’isle, quatre bassins d’eau, et quatre autres aux quatre coins de l’isle. De ces bassins et de plusieurs endroits des fossez il sort 73 jets d’eau. »

Publiée en novembre 1686 par le Mercure galant, la Suite du Voyage des Ambassadeurs de Siam en France décrit ainsi le bosquet de la Salle du Conseil ou des Festins33. Mercure galant, novembre 1686, p. 167-169. : « Cette Salle est plus longue que large. Le milieu est occupé par une pièce de gazon. Autour de ce gazon est un terrain sablé, aux quatre coins duquel on voit quatre bassins ronds et qui avancent sur un fossé d’eau qui environne ce lieu. Les rebords de ce fossé sont d’une figure bizare mais agréable, et qui comprend dans son pourtour plus de 30 angles saillans et autant de rentrans. Il y a, en dehors, quatre bassins vis-à-vis des quatre milieux, de sorte que ces bassins, joints à ceux qui sont aux quatre angles du dedans, font que cette manière de Salle en paroist entourée. Elle l’est toute de jets d’eau, car, outre ceux qui sont dans ces huit bassins, le fossé d’eau en est tout remply. Chacun de ces jets, tant des bassins que du fossé, est un groupe d’enfans dont les attitudes sont différentes, et tous ces groupes sont dorez. Les ponts-levis, par lesquels on entre dans ce lieu, se retirent sous terre par une manière de ressort, de sorte qu’on s’y peut trouver enfermé. »

Les figures enfantines

Selon l’Estat général de 1694, le bosquet de la Salle du Conseil comportait44. Inventaire des sculptures des jardins de Versailles, 1erjanvier 1694, no 296-304. :

  • quatre enfants des frères Marsy (no 296, 297, 298 et 299) ;
  • quatre enfants de Regnaudin (no 300, 301, 302 et 303) ;
  • et, dans le fossé, seize enfants de Girardon et de Tuby (no 304).

Ces indications sont confirmées par le tableau d’Étienne Allegrain (fig. 1) représentant le bosquet de la Salle du Conseil en 1688.

Jardins de Versailles - Vue du bosquet de la salle des Festins ou du Conseil
fig. 1 - Étienne Allegrain, Vue du bosquet de la salle des Festins ou du Conseil (détail), 1688. Huile sur toile. Versailles, musée national des châteaux de Versailles et de Trianon, MV 754 © Château de Versailles, Dist. RMN-Grand Palais / Christophe Fouin

De ces vingt-quatre figures enfantines, vingt provenaient des bassins des Saisons, qui en avaient été dépouillés en 1681 – à l’exception du bassin de Bacchus (Vjs 377), qui avait conservé les siennes au moins jusqu’en 1686, date à laquelle elless sont encore décrits en place55. Mercure galant, novembre 1686, p. 163-165..

À une date non précisée, mais postérieure à juin 1681, Girardon fut rétribué « pour avoir rétabli Saturne en la Salle du Conseil66. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. II, col. 63, paiement de 1 317 livres. ».
Les descriptions du bosquet de la Salle du Conseil font état de huit petits Amours de Girardon symbolisant l’Hiver, répartis dans le fossé entourant l’île centrale. Ce dernier comportait aussi huit zéphirs de Jean-Baptiste Tuby provenant du bassin de Flore (Vjs 271). Dans la mesure où seulement quatre Amours provenaient du bassin de l’Hiver (Vjs 175), il faut supposer que les quatre autres furent réalisés, vraisemblablement par Girardon, en 168177. Maral, 2015, p. 102-104..

Jardins de Versailles - Vue de bosquet avec bassin et jets d’eau, dite la Salle des Festins à Versailles
fig. 2 - France-fin du xviie siècle, Vue de bosquet avec bassin et jets d’eau, dite la Salle des Festins à Versailles, vers 1690. Dessin. Paris, musée du Louvre, département des Arts graphiques, Fonds des dessins et miniatures, Réserve des grands albums, Album Pérelle, Silvestre, fol. 16 (Inv. 34231-recto) © RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Jean-Gilles Berizzi

Toutes ces figures enfantines sont visibles sur le tableau d’Allegrain (fig. 1) et sur le dessin anonyme (fig. 2) de l’album Pérelle du Louvre.
Ainsi, les quatre statues d’Amour moissonneur de Thomas Regnaudin furent placées au centre des petits bassins circulaires marquant les angles du terre-plein central.
Les quatre figures de Satyre enfant de Gaspard et Balthasar Marsy furent disposées au centre des bassins circulaires périphériques.
Le fossé reçut seize statues d’Amour, huit de François Girardon et huit de Jean-Baptiste Tuby.

Huit figures enfantines quittèrent le bosquet de la Salle du Conseil pour les jardins du château de Meudon, peut-être dès 1695 – année où Louis XIV fit don de sculptures à son fils pour son château de Meudon. Elles y sont mentionnées par un inventaire datable de 1697-169888. Inventaire des sculptures de Meudon, [1697-1698], p. 441. :

  • deux des huit figures enfantines de Girardon, transformées en un groupe (Vjs 1237) ;
  • les quatre figures enfantines de Regnaudin (Vjs 879, Vjs 1070, Vjs 1071 et Vjs 1072) ;
  • deux des huit figures enfantines de Tuby, transformées en un groupe (Vjs 745).

Aucune des figures enfantines de Meudon n’est désormais localisée.

En 1706, lors de la transformation du bosquet de la Salle du Conseil en bosquet de l’Obélisque, les seize figures enfantines restantes furent ôtées99. En novembre 1706, le marquis de Dangeau signale deux visites de Louis XIV au nouveau bosquet remplaçant celui de la Salle du Conseil (Journal de Dangeau, 1684-1720, t. XI, p. 254 et p. 256-257 [passages cités dans Marie, 1976, p. 389])..
Une (Vjs 873) des quatre figures enfantines des frères Marsy semble avoir disparu dès 1706.

Quinze figures enfantines furent transférées dans les jardins de Trianon (voir Jardin des Marronniers ; Jardin du Roi, jardin des Sources et parterre du Laocoon ; Parterre haut et parterre bas) :

Seuls les groupes de Deux Amours de Girardon (inv. 1850.9850 et inv. 1850.9851) et le groupe de Satyre et panthère des frères Marsy (inv. 2012.00.237) existent encore dans les jardins de Trianon. Les autres figures enfantines ne sont plus actuellement localisées : à l’exception de l’Amour qui se mire dans l’eau (Vjs 847) et de l’Amour qui admire un jet d’eau (Vjs 848), qui disparurent dans les premières années du règne de Louis XVI, elles ont été remplacées par des surmoulages entre 1890 et 1941.

Les vases

Selon une note datée du 6 septembre 1692, le bosquet de la Salle du Conseil comportait quatre vases de marbre de Claude Bertin1010. Note du 6 septembre 1692..
Les deux premiers forment une paire : il s’agit des deux Vases aux anses formées d’un terme phytomorphe (MR 2977 et MR 2978).
Les deux autres constituent aussi une paire : il s’agit des deux Vases aux anses formées d’un dragon (Vjs 825 et Vjs 901).
Ces quatre vases pourraient être concernés par les paiements d’avril-décembre 1688 « pour les six vases de marbre qui doivent estre faits pour le roy1111. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. III, col. 37. ». Ces vases étaient encore en cours d’exécution en février 16891212. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. III, col. 249..
Les deux autres vases de cet ensemble pourraient être ceux du parterre du Midi (MR 2788 et MR 2789) : ils sont d’une forme et d’un décor assez proches de ceux du bosquet de la Salle du Conseil.

L’Estat général de 1694 confirme la présence des quatre vases de Bertin au bosquet de la Salle du Conseil1313. Inventaire des sculptures des jardins de Versailles, 1erjanvier 1694, no 37-40..

Les deux Vases aux anses formées d’un terme phytomorphe (MR 2977 et MR 2978) sont attestés sur le parterre du Nord par l’inventaire de 1707 et le guide de Jean-Aymar Piganiol de La Force la même année. Ils y sont encore aujourd’hui.
Les deux Vases aux anses formées d’un dragon (Vjs 825 et Vjs 901) sont mentionnés à Marly par les inventaires de 1707 et de 1722. Ils ont été récemment identifiés par Cyril Pasquier sur le perron de l’hôtel de Lassay à Paris.

Le bosquet de la Salle du Conseil fut remplacé par le bosquet de l’Obélisque en 17061414. Journal de Dangeau, 1684-1720, t. XI, p. 254, 24 novembre 1706..

1. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. I, col. 517.
2. Félibien, 1674, p. 75-76.
3. Mercure galant, novembre 1686, p. 167-169.
4. Inventaire des sculptures des jardins de Versailles, 1erjanvier 1694, no 296-304.
5. Mercure galant, novembre 1686, p. 163-165.
6. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. II, col. 63, paiement de 1 317 livres.
7. Maral, 2015, p. 102-104.
8. Inventaire des sculptures de Meudon, [1697-1698], p. 441.
9. En novembre 1706, le marquis de Dangeau signale deux visites de Louis XIV au nouveau bosquet remplaçant celui de la Salle du Conseil (Journal de Dangeau, 1684-1720, t. XI, p. 254 et p. 256-257 [passages cités dans Marie, 1976, p. 389]).
10. Note du 6 septembre 1692.
11. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. III, col. 37.
12. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. III, col. 249.
13. Inventaire des sculptures des jardins de Versailles, 1erjanvier 1694, no 37-40.
14. Journal de Dangeau, 1684-1720, t. XI, p. 254, 24 novembre 1706.