Bosquet du Marais
Dit également du Chêne-Vert, le bosquet du Marais fut aménagé à partir de 167111. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. I, col. 528.. Il était situé dans l’angle nord-est de l’actuel bosquet des Bains d’Apollon, son accès se faisant – par une allée rectiligne dont le départ existe encore aujourd’hui – depuis l’actuel rond-point des Philosophes.
Selon Charles Perrault : « Mme de Montespan donna le dessein de la pièce du Marais, où un arbre de bronze jette de l’eau par toutes ses feuilles de fer-blanc et où les roseaux de même étoffe jettent aussi de l’eau de tous côtés22. Mémoires de Charles Perrault, vers 1700, p. 210.. »
Selon André Félibien, « c’est un grand carré d’eau, au milieu duquel est un gros arbre si ingénieusement fait qu’il paroist naturel. De l’extrémité de toutes ses branches sort une infinité de jets d’eau qui couvrent le marais. Outre ces jets, il y en a encore un grand nombre d’autres qui, jaillissant des roseaux qui bordent les costez de ce quarré, le font paroistre un véritable marais. Aux quatre coins sont quatre cygnes dorez, qui semblent avoir fait leur nid dans les roseaux et qui jettent une quantité d’eau considérable. Aux deux bouts de ce quarré d’eau sont deux enfoncemens où l’on monte par des marches de gazon. Au milieu de chacun de ces enfoncemens, il y a une grande table ovale de marbre blanc de douze pieds de long soutenue par un piédestal de quatre consoles de marbre jaspé. Sur chaque table, il y a une corbeille de bronze doré remplie de fleurs au naturel, de laquelle sort un grand jet d’eau qui retombe dedans et s’y perd sans mouiller la table […]. Au milieu des allées des costez, il y a aussi des enfoncemens, qui ont plus de trois toises de profondeur sur plus de dix toises d’ouverture, où, sur des marches de gazon, sont élevées de longues tables de marbre blanc avec trois gradins au-dessus, de marbre blanc et rouge, en forme de crédence, pour servir de buffets. Elles sont portées par quatre consoles qui finissent en pattes de lion33. Félibien, 1674, p. 61-63. ».
Les Cygnes (Vjs 789) et les buffets d’eau (Vjs 1045) sont visibles sur le dessin d’Israël Silvestre (fig. 1), préparatoire à une gravure datée de 1680, ainsi que sur le tableau de Jean Cotelle (fig. 2), commandé en 1688 pour Trianon. Les buffets d’eau sont l’objet d’une coupe et d’une élévation, conservées aux Archives nationales44. Agence des Bâtiments du roi, vers 1700..
Les quatre Cygnes (Vjs 789) du bassin étaient dus au sculpteur Jacques Houzeau, rétribué en 167255. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. I, col. 624.
En 1673-1674, le sculpteur Pierre Legros fut rétribué pour six « masques » et six consoles de plomb « pour les buffets du Marais66. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. I, col. 617. ». En 1673, Houzeau travailla aux « buffets de la pièce du Marais77. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. I, col. 696. ». Houzeau fut encore rétribué en 1677-1678, pour des interventions dont la nature n’est pas connue, des modèles ayant été réalisés en collaboration avec Pierre Mazeline88. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. I, col. 963..
Par ailleurs, les fondeurs Pierre Varin et Pierre Langlois furent rétribués en 1686 pour « unze groupes d’enfants de bronze pour les buffets du Marais99. Comptes des Bâtiments du Roi, 1664-1715, t. II, col. 994. ».
Durant l’été 1704, le bosquet du Marais accueillit les trois groupes sculptés provenant initialement de la grotte de Téthys et installés depuis 1684 au bosquet des Dômes, dit depuis lors aussi bosquet des Bains d’Apollon1010. Hernmarck, Weigert, 1964, p. 334-335, lettres de Daniel Cronström à Nicodème Tessin, 18 juillet 1704 (« on commence à détruire Versailles sans donner au temps celluy de le faire : l’on défaict actuellement le bosquet des Bains d’Apollon pour en transporter les statues à Marly ») et 21 août 1704 (« on n’a pas mené les statues du Bain d’Apollon à Marly comme je vous l’avois mandé : on les a placées d’une autre manière dans le bosquet du Chesne-Vert, qui a entièrement changé de face par là et est devenu fort beau »).. Le bosquet du Marais fut dès lors à son tour désigné comme bosquet des Bains d’Apollon, le deuxième à avoir porté ce nom.
Provenant des buffets d’eau (Vjs 1045), deux consoles ornées de coquilles et de glaçons (inv. 2017.00.160.1-2) et quatre consoles en forme de pattes de griffon finissant en rinceaux (inv. 2014.00.1235.1-4) constituent les seuls vestiges du bosquet du Marais. Ces éléments, probablement mis en magasin en 1704, furent en partie réutilisés en 1886 au bosquet de l’Arc de triomphe. Ils sont conservés depuis 2000 dans la réserve lapidaire de Versailles.